Le commerce socle de la paix entre les nations

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« Si les marchandises ne traversent pas les frontières, les soldats le feront». Cette citation est souvent attribuée à l’économiste français Frédéric Bastiat. Bien qu’aucune documentation n’ait confirmé qu’il l’ait réellement dit, la déclaration n’en demeure pas moins pertinente.

La relation entre le commerce et la paix

Une étude récente de Jong-Wha Lee et Ju Hyun Pyun (L’intégration commerciale favorise-t-elle à la paix ? 2013) a révélé l’existence d’une forte corrélation entre le commerce et la paix. L’examen d’un «ensemble de données de grands panels composés de 243 225 observations de paires de pays» sur 50 ans «confirme que l’intensification de l’interdépendance commerciale bilatérale favorise de manière significative la paix». Mais ce n’est pas tout. Ils ont surtout constaté que «l’ouverture du commerce mondial favorise considérablement la paix». Ceci est plus vrai pour les pays éloignés géographiquement que par ceux partageant des frontières. Cette étude est une preuve empirique importante qui conforte l’idée que le commerce favorise la paix ainsi que la prospérité. Que Bastiat l’ait dit ou non, beaucoup ont constaté la nature pacificatrice du commerce, via la modification des incitations lorsque les opportunités d’accéder aux marchés sont élargies.

L’économiste politique et sociologue Max Weber avait écrit qu’une économie capitaliste est «une économie qui repose sur la poursuite d’un profit en exploitant des opportunités d’échange, c’est-à-dire des chances (formelles) pacifiques de profit». Il a opposé cela à «l’acquisition par la force », qui est une transaction non opportune.

Augmenter les coûts de transport, et plus généralement entraver les échanges, a pour effet d’augmenter la prise de biens par la force ou par la colonisation. Malheureusement, les discours et les politiques les plus récents des Etats-Unis se sont concentrés sur une augmentation des droits de douane et une réduction des échanges, ce qui pourrait accroître les tensions avec les autres pays, en particulier la Chine. Empêcher les biens de circuler entre les nations ne sert qu’un instinct protectionniste, cela ne fait que nous priver des effets externes pacificateurs des biens échangés. Quelle que soit la menace que la Chine représente pour les États-Unis, ils ne s’en sortiront pas en rendant le commerce plus difficile.

Commerce doux

Il existe un autre point en faveur de la thèse du « commerce doux », au sens de commerce pacificateur, remplaçant la violence par l’échange. Cette thèse remonte à Montesquieu, qui a écrit dans son ouvrage L’Esprit des lois: « Le commerce guérit les préjugés destructeurs, et il est une règle presque générale que partout il y a des mœurs douces, il y a du commerce et que partout où il y a du commerce, il y a des mœurs douces. Par conséquent, il ne faut pas s’étonner si nos mœurs sont moins violentes qu’elles ne l’étaient jadis. Le commerce a répandu la connaissance des mœurs de toutes les nations du monde ; elles ont été comparées les unes aux autres, et de bonnes pratiques en ont émergé ».

Cette thèse a été défendue par les économistes classiques et modernes, d’Adam Smith à Deirdre McCloskey. L’interaction pacifique, l’influence tempérante, les mœurs douces ont été considérées comme faisant partie des avantages sociaux du commerce, tant au niveau national qu’international, et l’étude de Jong-Wha Lee et Ju Hyun Pyun l’a maintenant démontré. Le commerce lie les individus éloignés et étrangers. Il les met sur un pied d’égalité ; non pas une égalité stricte mais une égalité inhérente à la participation au marché qui crée un espace de participation pour les individus. Refuser l’accès aux marchés a un effet aliénant et stratifiant au sein des communautés. Il n’est pas surprenant que cette aliénation se répète au-delà des frontières lorsque les marchés sont restreints.

Commerce unilatéral

Les politiques conflictuelles doivent être évitées au profit de celles qui encouragent l’ouverture et la coopération. Le commerce est en réalité un processus de coopération, il engendre moins de coûts que ceux liés à la résolution d’un conflit. Les politiques qui nous orientent vers un plus grand commerce transfrontalier ouvrent la voie vers la prospérité et la paix. Cela fait partie du processus de marché qui génère des prix, ce que Ludwig von Mises a appelé «un processus social». La tentation d’utiliser le pouvoir de l’État pour empêcher le commerce découle d’une perspective protectionniste, qui utilise le pouvoir politique pour protéger certains intérêts au détriment d’autres. C’est le socle des inégalités et de la corruption.

Ainsi, l’implication de cette étude – et de nombreuses années d’histoire – ont bien résumé la thèse de Bastiat : «Les barrières entraînent l’isolement ; l’isolement engendre la haine ; la haine conduit à la guerre ; la guerre finit par l’invasion. » Quelle différence cela fait-il? Ne vaut-il pas mieux risquer la possibilité d’une invasion commerciale que d’accepter la certitude d’une invasion plus violente? C’est comme devoir choisir entre comme un navire de guerre qui vomit des missiles, dévaste nos villes ; et un navire marchand qui nous offre un échange volontaire et mutuel de marchandises. Je vous laisse le choix.

Le commerce n’est certes pas une garantie absolue de paix, mais les preuves montrent qu’il s’agit de la meilleure alternative.

James Devereaux, avocat.

Article publié en collaboration avec Libre Afrique.

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