Afrique du Sud : il est temps de vivre et de laisser vivre

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Le statut économique médiocre de l’Afrique du Sud est le fruit direct de l’intransigeance politique. Les décisions actuelles du gouvernement ignorent les leçons de l’histoire. Dans un contexte où l’économie est déjà fragile, l’élaboration persistante de politiques défavorables est carrément destructrice et conduit à une réduction des investissements productifs, ce qui cause des torts indicibles aux citoyens.

Quelles politiques permettraient le recul de la pauvreté ?

Il est temps de changer de politique et de mettre en place un système qui place les intérêts du peuple avant les intérêts étroits des politiciens à la tête du gouvernement et de leurs courtisans en quête de rente. Les politiques porteuses de changements positifs consisteraient à:

– Abandonner toutes les lois et tous les réglementations discriminantes qui causent des tensions raciales, ralentissent la croissance économique et aggravent (et non réduisent) la pauvreté des pauvres.

– Donner aux pauvres du pays, au prorata de leurs ressources, les parts de propriété de toutes les entreprises d’État héritées du gouvernement de l’apartheid, comme cela a été fait avec succès en République tchèque. De même, il faut permettre aux occupants d’accéder à la propriété complète et sans restriction des maisons municipales où ils habitent légitimement ; et donner aux communautés traditionnelles (en tant que communautés) un titre de propriété sur la terre qui leur revient de droit. Cette mesure à double tranchant constituerait à elle seule un catalyseur pour l’autonomisation économique à une échelle sans précédent.

– Adapter la législation du travail pour permettre aux chômeurs de longue durée (depuis 6 mois ou plus) de contracter volontairement des contrats de leur choix avec les employeurs, en particulier les propriétaires de micro-entreprises.

– Supprimer toutes les paperasseries qui causent des coûts inutiles aux entrepreneurs et les empêchent de fournir des biens et des services aux consommateurs de la manière la plus efficace et la plus efficiente possible. Cela aura pour conséquence une prolifération d’entreprises, en particulier dans le secteur des PME à forte intensité de main-d’œuvre.

Ces propositions toucheraient directement les pauvres, les libéreraient de la pauvreté de manière à renforcer la croissance économique et à permettre à l’économie de fonctionner de manière optimale.

Prendre en compte l’histoire des réussites économiques mondiales

Lors de l’examen des recommandations proposées, les gouvernements devront prendre en compte l’histoire économique mondiale. La révolution industrielle qui a changé le monde pour toujours a été déclenchée par des changements de politiques spécifiques. Ainsi, les travaux de feu le professeur Angus Madisson, montrent comment le PIB par habitant dans le monde n’a commencé à augmenter rapidement qu’à partir de la fin du 17ème siècle. Jusqu’à il y a un peu plus de deux siècles, la plupart des habitants de la planète vivaient dans la pauvreté et la misère. Au cours des dernières décennies du 18ème siècle et du début du 19e siècle, l’Angleterre a subi une transformation majeure, connue sous le nom de révolution industrielle. Ces changements devaient influencer positivement les événements dans le reste du monde, y compris en Afrique du Sud, et se traduire par des revenus plus élevés et des conditions de vie améliorées ce qui aurait été inconcevable au cours des siècles précédents.

Il est généralement admis que l’un des changements les plus importants survenus pendant la révolution industrielle a été la production en série rendue possible par l’introduction de machines. La révolution de l’éducation qui a accompagné la révolution industrielle, et qui a permis aux Anglais d’être bien instruits et d’améliorer leurs compétences techniques, est moins connue. Certains métiers ont disparu du fait des progrès techniques, mais de nombreux autres ont été créés, de la même manière que les téléphones ont remplacé les tubes parlants et les ordinateurs ont remplacé les livres comptables. En 1951, 37% de la population active anglaise, soit plus de 6 millions de personnes, étaient classées dans la catégorie des artisans qualifiés, et 30% étaient des cols blancs, ce qui dénote une amélioration substantielle par rapport aux périodes antérieures.

La révolution industrielle est souvent présentée à tort comme une période de souffrances accrues pour les travailleurs. La vérité est que les personnes qui ont quitté les fermes et le travail domestique pour travailler dans les usines l’ont fait pour améliorer leurs revenus ainsi que leurs conditions de travail et de vie. De même, l’urbanisation en cours en Afrique du Sud est motivée par la recherche de meilleures opportunités à long terme pour les familles que celles que l’on peut trouver dans les fermes et dans les zones rurales. Le changement doit consister à transformer les conditions pour les personnes qui n’ont pas appris à lire et à compter, pour acquérir des compétences qui leur permettront de gagner leur vie pour eux-mêmes et leur famille et de ne pas dépendre des autres pour leur bien-être.

Si les propositions décrites dans cet article étaient adoptées, l’Afrique du Sud, comme d’autres pays africains d’ailleurs, connaîtrait sa propre révolution économique, une transformation positive dans laquelle tous les habitants du pays œuvreraient en faveur d’une croissance économique plus forte et d’une vie meilleure, pour eux-mêmes et pour tous les autres. Vivre et laisser vivre, avec l’égalité de tous devant la loi, est le moyen de favoriser la coopération dans tous les domaines et d’améliorer la vie de tous les Sud Africains.

Temba Nolutshungu, analyste pour The Free Market Foundation, article initialement publié en anglais par la Free Market Foundation – Traduction réalisée par Libre Afrique – Le 9 décembre 2019.

Article publié en collaboration avec Libre Afrique.

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