La Côte d’Ivoire déclare la guerre à la corruption

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Alors que la corruption reste un « grand défi » en Afrique, notre gouvernement, sous l’impulsion de son président, Alassane Ouattara, met en œuvre les changements nécessaires à l’instauration d’une gestion transparente et efficace des ressources publiques. Après un bond de presque dix places dans l’Indice de perception de la corruption en 2015, le pays poursuit sa marche vers la transparence en se dotant d’une Cour des comptes.

Avec la mise en place, le 8 janvier dernier, d’une Cour des comptes — prévue par la Constitution de novembre 2016 —, la Côte d’Ivoire fait « un saut qualitatif dans l’histoire de la juridiction financière » du pays et se conforme « pleinement aux dispositions pertinentes du Traité de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) », selon le président Alassane Ouattara.

La nouvelle institution aura en charge le contrôle de la gestion des comptes des services de l’Etat, des établissements publics nationaux, des collectivités territoriales et des autorités administratives indépendantes. Plus généralement, tous les organismes bénéficiant du concours financier de l’Etat ou d’une autre personne morale de droit public, ainsi que tous les organismes bénéficiant du concours financier d’entreprises publiques et de leurs filiales, sont concernés.

Et cela tombe bien. La corruption demeure « le grand défi » en Afrique, comme le souligne Abdul Tejan Cole, directeur d’Open Society Initiative for West Africa (OSIWA). Selon l’expert, « s’il y a un front sur lequel la plupart des pays africains sont en difficulté, c’est bien celui de la lutte contre la corruption ». Malgré des « succès nombreux », le continent reste confronté à des défis importants.

« Comment faire en sorte que les élections ne soient pas simplement un moyen de sélectionner un dirigeant dans un pays, mais une occasion pour les citoyens d’influencer les politiques publiques, de contribuer à la transformation de leur pays ? Comment faire en sorte que les institutions de contrôle contribuent effectivement à la reddition des comptes par les gouvernements et à veiller à ce que la voix des citoyens soit entendue et prise en compte ? », se demande-t-il.

Un pas décisif vers la transparence

Afin de répondre à ce type de questions, la Côte d’Ivoire multiplie les actions pour la moralisation de la vie publique. En 2015, le pays est ainsi devenu le premier d’Afrique subsaharienne francophone à rejoindre le Partenariat pour un gouvernement ouvert (POG), dont la mission est d’améliorer la transparence dans la gestion des affaires publiques.

Les pays souhaitant intégrer le POG doivent répondre à quatre critères bien précis : transparence budgétaire, facilité d’accès à l’information, publication de la déclaration de patrimoine des agents de la fonction publique et promotion de la participation et l’engagement des citoyens dans l’action publique.

Peu de temps après son adhésion, la Côte d’Ivoire montrait une fois encore sa volonté de transparence : afin d’« améliorer et garantir l’égalité d’accès aux données publiques à l’ensemble des partenaires techniques et financiers, au secteur privé, à la société civile et aux citoyens », le gouvernement a mis en ligne, en août 2016, le site data.gouv.ci, une plateforme de partage de données en matière de finances publiques, de santé, d’éducation et d’infrastructures.

La mise en place de la Cour des comptes s’inscrit également dans cette stratégie de moralisation et constitue un pas décisif vers la transparence et le développement. « Ma première tâche est de veiller à la stricte application des règles de gestion des finances publiques », a déclaré Kanvaly Diomandé, le premier président de la Cour nouvellement créée.

Une politique « plus rigoureuse »

Alassane Ouattara a quant à lui affirmé n’avoir « aucun doute sur la volonté du Pr Diomandé d’exercer ses fonctions avec rigueur, équité et justice » afin de permettre à la Côte d’Ivoire « de poursuivre et consolider ses progrès dans le domaine de la bonne gestion dans le secteur public et la lutte contre le gaspillage et les détournements de biens publics ».

Le pays a en effet quelques progrès à faire : en 2015, la Côte d’Ivoire est certes passée de la 115e à la 107e place sur 168 Etats à l’échelle mondiale dans l’Indice de perception de la corruption de Transparency international. Mais le pays est retombé à la 108e place en 2016. Par ailleurs, en octobre 2017, selon l’institut Afrobaromètre, 47 % des Ivoiriens affirmaient « avoir payé un pot-de-vin à un policier » au cours des douze mois précédents.

Conscient de cette réalité, le Premier ministre ivoirien, Amadou Gon Coulibaly, a récemment appelé à ne pas baisser les bras : « le niveau de maturité de notre gouvernance mérite d’être renforcé par une politique plus rigoureuse, soutenue par les pouvoirs publics et exécutée par tous les services de l’Etat impliqués sous la coordination de la Haute autorité pour la bonne gouvernance ».

Si le chemin vers la transparence est encore long, la Côte d’Ivoire — en mettant en place une Cour des comptes — a envoyé un message on ne peut plus clair : la lutte contre la corruption est une priorité.

Ibrahim Diabate

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