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L’orpaillage illégal continue de s’étendre en Côte d’Ivoire, malgré les mesures engagées par les autorités pour endiguer ce phénomène. Présent dans de nombreuses régions du pays, ce type d’exploitation artisanale et clandestine de l’or engendre des conséquences graves sur l’environnement, l’économie nationale, la sécurité et les conditions de vie des populations riveraines.
Une activité en expansion
Le phénomène touche principalement les régions de Séguéla, Dabakala, Mankono, Bonon, Kaniasso ou encore Yakassé-Attobrou. Des centaines de sites sont exploités en dehors de tout cadre légal, échappant aux règles environnementales et fiscales en vigueur. Ces zones, parfois situées dans des forêts classées ou sur des terres agricoles, attirent une main-d’œuvre souvent étrangère, notamment en provenance du Mali, du Burkina Faso, de Guinée ou du Ghana.
Ces orpailleurs clandestins utilisent des techniques rudimentaires mais dangereuses, comme le creusement à la main, le lavage à la batée et l’usage de produits chimiques comme le mercure. L’absence de normes de sécurité ou de contrôle favorise la dégradation des sols, la pollution des cours d’eau, et la mise en danger des écosystèmes.
Conséquences environnementales et économiques
Sur le plan environnemental, l’impact est particulièrement préoccupant. La déforestation, l’érosion, la destruction des habitats naturels et la contamination des ressources en eau sont autant de menaces directes sur les moyens de subsistance des populations locales.
Sur le plan économique, l’orpaillage illégal prive l’État de recettes fiscales importantes. Selon des estimations relayées par la Chambre des Mines, le manque à gagner dépasserait 50 milliards de francs CFA par an. Par ailleurs, la concurrence déloyale exercée sur les sites d’exploitation industrielle légalement installés compromet les investissements dans le secteur minier.
Insécurité et tensions communautaires
Les sites d’orpaillage illégal sont souvent à l’origine de tensions communautaires. Dans plusieurs localités, des affrontements entre orpailleurs et populations locales ont été signalés. La présence de groupes armés, le développement de réseaux de trafic (armes, drogue, prostitution), ainsi que la multiplication des accidents mortels renforcent les inquiétudes en matière de sécurité publique.
Le phénomène contribue également à la déscolarisation des enfants dans certaines zones rurales, ainsi qu’à une paupérisation progressive des communautés agricoles, privées de terres exploitables.
Une réponse gouvernementale en cours
Pour faire face à la montée en puissance de l’orpaillage illégal, le gouvernement ivoirien a adopté plusieurs mesures. Des opérations de déguerpissement sont régulièrement menées par les forces de l’ordre, en coordination avec les ministères de l’Intérieur, de la Défense et des Mines. La Brigade spéciale de répression de l’orpaillage illégal (BSROI), créée en 2023, mène des interventions ciblées sur les zones les plus touchées.
Parallèlement, les autorités encouragent l’encadrement de l’orpaillage artisanal à travers la mise en place de périmètres légalement attribués à des coopératives, sous supervision de l’état. Des campagnes de sensibilisation et des projets pilotes de reconversion économique sont également en cours.
Perspectives
Malgré ces efforts, les défis restent importants. Le succès de la lutte contre l’orpaillage illégal dépendra à long terme d’une stratégie globale intégrant sécurité, développement local, création d’emplois durables et renforcement du contrôle territorial. Une meilleure coopération régionale s’avère aussi indispensable pour limiter les flux transfrontaliers d’orpailleurs et de matériaux illicites.
Le phénomène de l’orpaillage illégal constitue aujourd’hui un véritable enjeu national. Il appelle une réponse ferme mais aussi inclusive, dans le respect des droits des communautés et de la préservation du patrimoine naturel ivoirien.
F. Kouadio
Cap’Ivoire Info / @CapIvoire_Info