Chronique de Venance Konan: Gbagbo à la retraite ?

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Dans une récente interview accordée à une chaîne de télévision africaine, l’ancien Président, Laurent Gbagbo, a annoncé qu’après le prochain congrès de son parti, il démissionnerait de son poste de président et n’occuperait plus de fonction, aussi bien à l’intérieur de son parti qu’au niveau de l’État. En clair, il ne cherchera plus à être président de son parti ou de la République. Mais il a aussi été clair : en politique, on ne prend jamais de retraite.

Cela veut dire qu’il sera toujours actif sur la scène politique ivoirienne ou dans les coulisses. J’imagine d’ailleurs difficilement Laurent Gbagbo laisser le Président Ouattara faire son nouveau mandat sans lui mettre des bâtons dans les roues. Je ne serai pas non plus étonné qu’un chœur de pleureuses et de pleureurs de son parti vienne le supplier à chaudes larmes à la veille de son congrès de rester toujours à la tête du Ppa-CI. Ce à quoi il répondrait favorablement, à son corps défendant bien entendu.

Ne sommes-nous pas sur un continent où les militants forcent toujours leurs leaders à rester au pouvoir contre leur propre gré ? À moins que Gbagbo n’ait annoncé son retrait de son parti parce qu’il s’y trouve des personnes, dont Don Mello, qui lui cassent les pieds et qu’il leur laisse le Ppa-CI pour aller en créer un autre où cette fois-ci, il serait seul avec sa femme ?

Quoiqu’il en soit, personne ne peut croire totalement à un retrait de Gbagbo de la scène politique, tant qu’Alassane Ouattara y sera actif. Le Woody de Mama l’a dit. Il a décidé de se présenter à la dernière élection présidentielle parce que Ouattara y allait.

Non, il n’avait rien à proposer aux Ivoiriens, mais il voulait juste contrarier Ouattara. Et je crois que nous pouvons dire que nous l’avons échappé belle avec le rejet de sa candidature par le Conseil constitutionnel. Gbagbo aurait à tous les coups contesté les résultats, s’il avait compéti et avait perdu, nous plongeant à nouveau dans une crise post-électorale. Il a dit dans son interview qu’il avait gagné en 2010, parce que le Conseil constitutionnel l’avait proclamé vainqueur et il voulait jouer le match retour, pour confirmer sa victoire de 2010. Il est clair que jusqu’à la fin de leur vie, Gbagbo et les siens répèteront inlassablement que le Conseil constitutionnel l’avait désigné vainqueur, et nous leur répèterons jusqu’à la fin de notre vie que dans une situation normale, c’est effectivement le Conseil constitutionnel qui a le dernier mot dans une élection. Mais en 2010, nous étions en crise et tous les leaders politiques ivoiriens, à commencer par Laurent Gbagbo lui-même, avaient signé un accord à Pretoria qui accordait ce dernier mot au Représentant spécial du secrétaire général des Nations unies. Et celui-ci avait désigné Alassane Ouattara vainqueur. Point.

Cela dit, il est cependant pathétique qu’un leader politique, ancien Président de la République de surcroît, dise qu’il a cherché à être candidat, uniquement parce que son adversaire l’était aussi. Et parce que sa candidature a été refusée, il a poussé des jeunes gens à manifester, avant de dire qu’il n’appelle plus personne à descendre dans les rues, tout en soutenant ceux qui y sont déjà. Parce qu’il y a eu des morts et des arrestations qu’il ne veut pas assumer. En tout état de cause, nous serons tous un jour confrontés au jugement de l’histoire qui est le plus grand magistrat du monde.

Laurent Gbagbo a dit également dans son interview qu’il ne voit pas l’utilité du pont Alassane Ouattara qui relie Cocody au Plateau ou de la dernière tour en construction à la cité administrative. Rappelons que lorsqu’il était au pouvoir, il n’avait pas vu l’utilité du pont Henri Konan Bédié qui était déjà projeté, et pour bien montrer qu’il n’avait aucune intention de le construire, il a laissé un de ses proches construire sa maison à l’endroit même où se trouve actuellement le poste de péage de ce pont. Les monuments hideux qu’il avait construits un peu partout dans la ville lui semblaient certainement plus utiles que ces ponts et immeubles.

Avait-il seulement compris ce que c’était que de développer un pays, une ville ? On se souvient de ce qu’il avait fait du carrefour de l’Indénié qui était toujours inondé à chaque ondée. Je suppose que ce qui y a été réalisé aujourd’hui est aussi inutile à ses yeux.

Venance Konan
Fratmat.info

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