Trois chauffeurs ivoiriens tués au Mali : une attaque qui inquiète la sous-région

2864

[ Publié / Modifié il y a

Trois transporteurs ivoiriens ont perdu la vie dimanche 21 septembre 2025 au Mali, dans une attaque armée survenue sur l’axe Sikasso–Bougouni, dans le sud du pays. Les victimes étaient des conducteurs de la société Civotech, spécialisée dans le transport de bitume. Leurs camions-citernes ont été incendiés par des assaillants armés identifiés comme appartenant à un groupe jihadiste.

Une embuscade brutale
Selon les témoignages recueillis dans la région, le convoi de Civotech avait quitté la Côte d’Ivoire pour rallier des chantiers maliens. À une cinquantaine de kilomètres de Sikasso, des hommes armés surgis de la brousse ont contraint les véhicules à s’immobiliser. Trois camions-citernes ont été incendiés. Les chauffeurs, tous de nationalité ivoirienne, ont péri dans les flammes.
Des rescapés, grièvement blessés, ont réussi à s’échapper et à donner l’alerte. Mais pour les trois victimes, toutes originaires de Côte d’Ivoire, l’issue a été fatale. L’information s’est rapidement répandue dans les villages frontaliers et parmi les transporteurs routiers, provoquant une vive émotion.

Le sud du Mali désormais exposé
Cette attaque est l’une des plus meurtrières survenue récemment dans le sud du Mali. Longtemps concentrés sur le nord et le centre du pays, les groupes jihadistes étendent désormais leurs opérations vers des zones jusque-là considérées comme plus sûres. Le Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM), coalition affiliée à Al-Qaïda, est particulièrement actif dans cette stratégie.
En s’attaquant à l’axe Sikasso–Bougouni, les assaillants visent un corridor vital reliant Bamako à la Côte d’Ivoire. L’objectif est clair : instaurer l’insécurité sur les routes pour perturber les flux économiques. Le JNIM cherche à affaiblir Bamako en rendant plus difficile l’acheminement des marchandises essentielles : carburant, matériaux de construction, denrées alimentaires.

Une stratégie d’asphyxie économique
La capitale malienne, enclavée, dépend largement de ses voisins pour ses approvisionnements. Le port d’Abidjan joue un rôle central dans cet équilibre. Chaque jour, des centaines de camions empruntent le corridor Abidjan–Bamako. En visant les convois civils, les jihadistes espèrent étouffer économiquement le Mali et accroître la pression sur les autorités de transition.
L’incendie de camions transportant du bitume en est une illustration. Le bitume est indispensable pour les chantiers routiers et l’entretien des infrastructures. Sa destruction ralentit les projets de développement et accentue les difficultés d’un État déjà fragilisé par des années de crise sécuritaire et politique.

Les répercussions pour la Côte d’Ivoire
Au-delà du drame humain, la mort de trois chauffeurs ivoiriens interpelle directement Abidjan. La Côte d’Ivoire est le principal partenaire logistique du Mali. Ses ressortissants, en particulier les transporteurs routiers, sont en première ligne sur des routes de plus en plus dangereuses.
Cette attaque souligne la vulnérabilité des travailleurs ivoiriens à l’étranger et pose la question de la sécurité des corridors commerciaux. Les familles des victimes, dans l’attente du rapatriement des corps, expriment leur douleur et leur inquiétude. Dans le milieu du transport, nombreux sont ceux qui redoutent que ce genre d’incidents ne se multiplie, compromettant le commerce régional.

Silence officiel, inquiétude sur le terrain
À Bamako, les autorités n’ont pas encore publié de communiqué officiel au lendemain de l’attaque. À Abidjan, la prudence reste de mise. Mais sur le terrain, la peur grandit. Les populations maliennes de la région de Sikasso s’inquiètent de voir la violence jihadiste gagner du terrain. Les transporteurs ivoiriens, pour leur part, redoutent d’être de plus en plus exposés à ce type d’embuscades.
L’insécurité sur les routes du sud malien menace la fluidité des échanges entre les deux pays. Pour les familles des victimes comme pour l’ensemble de la profession, la tragédie du 21 septembre marque un tournant : la route Abidjan–Bamako, colonne vertébrale des échanges commerciaux, n’est plus un espace sûr.
L’attaque de Sikasso–Bougouni, qui a coûté la vie à trois chauffeurs ivoiriens, est bien plus qu’un drame isolé. Elle illustre la volonté des groupes jihadistes de transformer les routes commerciales en zones de danger permanent et de fragiliser Bamako par une guerre économique.
Pour la Côte d’Ivoire, elle rappelle la nécessité de renforcer la protection de ses ressortissants à l’étranger et de travailler avec ses voisins à sécuriser les grands corridors. Pour le Mali, elle met en lumière un défi central : sans sécurité sur ses routes, la capitale risque de s’asphyxier, victime d’une stratégie qui combine violence armée et sabotage économique.

Cap’Ivoire Info / @CapIvoire_Info

PARTAGER