Rapport sur les prisonniers politiques en Côte d’Ivoire 26 juillet 2018

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Les appels et les initiatives du régime ivoirien – créations de la CNE
(Commission Nationale d’Enquête), de la CDVR (Commission Dialogue Vérité
et Réconciliation), de la CONARIV (Commission Nationale pour la
Réconciliation et l’Indemnisation des Victimes des crises survenues en Côte
d’voire) et du PNCS (Programme National de Cohésion sociale) logé au
Ministère de la Femme, de la Protection de l’Enfant et de la Solidarité – en
faveur de la réconciliation, tiennent plus de la propagande politique que d’une
réelle volonté de remettre en harmonie les Ivoiriens et les Ivoiriennes après la
profonde fracture sociale provoquée par la crise postélectorale de 2011. Le
harcèlement des militants, des sympathisants et de tous ceux qui se réclament du
Front Populaire Ivoirien (FPI) en est la preuve irréfutable. Ils sont l’objet
d’intimidation, d’emprisonnement et d’injustices révoltantes. Afin d’informer
l’opinion nationale et internationale sur ces violations inacceptables des Droits
de l’Homme en Côte d’Ivoire en général et dans les pénitenciers où sont détenus
ses militants et ses sympathisants en particulier, le Secrétariat National de
l’Administration Pénitentiaire et des Prisonniers Politiques (SNAPPP) n’a eu de
cesse de produire régulièrement des rapports. Celui-ci est le premier de l’année
2018, il succède à celui de décembre 2017.
I- LES PRISONNIERS REPERTORIES
Les services du Secrétariat National de l’Administration Pénitentiaire et des
Prisonniers Politiques (SNAPPP) dénombrent, à ce jour, 228 détenus prisonniers
politiques. Ce nombre s’appuie sur le recoupement des différentes données
d’enquêtes et les recherches permanentes menées dans les maisons d’arrêt et de
correction à travers le territoire national.
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L’on est passé de 197 détenus (dernier rapport 2017) à 228 prisonniers
répertoriés à ce jour, du fait de nombreuses arrestations définitivement
répertoriées par nos enquêteurs et opérées en 2017 dans divers endroits du
territoire national comme Séguéla, Yopougon, Cocody, Bingerville, suite à des
affrontements qui semblaient impliquer des forces pro-Ouattara entre elles.
II- L’ENVIRONNEMENT CARCERAL
Les pratiques observées dans les prisons ivoiriennes s’apparentent à une
négation des Droits de l’Homme : les droits élémentaires reconnus à tout
prisonnier y sont volontairement ou non violés. On peut invoquer le droit à la
santé, aux rations de vivres et les cas de tortures.
1- Le droit à la santé
Les établissements pénitenciers de Côte d’Ivoire ne disposent pas d’hôpitaux qui
dispensent des soins à leurs pensionnaires. Mal équipées, dépourvues de
médicaments de premières nécessités et de services spécialisés, les infirmeries
des prisons ivoiriennes répondent rarement aux attentes de leurs usagers. Faute
de soins adéquats et accessibles, les détenus sont ainsi contraints à survivre avec
des pathologies durant la période de leur réclusion. Cela explique les décès qui
surviennent dans les rangs des prisonniers ou des ex-prisonniers quelque temps
après leur libération.
La situation des prisonniers politiques est plus préoccupante. Ils éprouvent
d’énormes difficultés pour accéder aux soins médicaux appropriés que nécessite
leur état de santé, surtout lorsque l’intervention d’un médecin de l’hôpital
général de la commune est nécessaire, ou lorsque l’évacuation du détenu malade
dans un centre hospitalier universitaire ou régional est envisagée. Bien souvent
les lenteurs de l’administration pénitentiaire et la maladie finissent par avoir
raison du patient. Les décès de détenus politiques dans de telles circonstances
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sont légion. On peut arguer la mort de M. KOUYA Gnépa Eric. Ce détenu
d’opinion et militant de l’UNG (Union des Nouvelles Générations), est décédé le
04 décembre 2015 à 7H 30 environ à la Maison d’Arrêt et de Correction
d’Abidjan (MACA) faute de soins appropriés des suites de tortures. Il souffrait
de divers troubles liés directement à ses conditions d’arrestation et de détention:
fièvre, infection, malnutrition, troubles cardiaques et neurologiques, ulcère
gastrique.
Il faut également rappeler le décès récent de M. KANON Blé Serge. Incarcéré à la
Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA) sous mandat de dépôt
(14/10/2011), l’état de santé de M. KANON Blé Serge s’est, sans cesse, dégradé
jusqu’atteindre le seuil critique. En dépit de l’urgence que nécessitait son état,
l’ordre d’évacuation du médecin ne sera effectif qu’un mois après son émission.
Le 19/06/2018, il est admis au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Cocody
puis au service d’hématologie du CHU de Yopougon, le 28/06/2018, dans un état
de pancytopénie (baisse drastique des composantes du sang). Il décède le samedi
30 juin 2018 à 22h suite à une maladie révélée et aggravée par les conditions de
vie précaires du milieu carcéral.
Par pure grâce, les plus chanceux obtiennent leur transfèrement dans un
établissement sanitaire pour y recevoir les soins indiqués. Ils y arrivent toujours
dans les moments où la vie ne tient plus qu’à un fil. On se souvient ici du cas du
ministre DANON Djédjé. A l’article de la mort suite à une crise cardiaque, le
Ministre DANON Djédjé, détenu alors à la prison de Toumodi, a dû la vie à son
transfèrement rapide à l’Institut de Cardiologie d’Abidjan. Suite à cette
évacuation sanitaire, les trois agents d’encadrement pénitentiaire en poste cette
nuit-là ont été sanctionnés par leur hiérarchie pour ‘’faute lourde’’, inculpés, et
mis aux arrêts à la MACA sous le Mandat de dépôt n° 16.10.2015. Il s’agit des
fonctionnaires KOMBO Kouassi Pierre, OUATTARA Ali et MONPOTCHAIN
Aristide.
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C’est dans des circonstances similaires à celles du Ministre DANON Djédjé que
M. DOUYOU Jean-Claude, alias SAMBA David (libéré le 25 juillet 2018 alors
qu’il était hospitalisé), est admis aux urgences du CHU de Treichville le
dimanche 15/07/ 2018. Après la levée de l’urgence, il est transféré à l’Institut de
Cardiologie le mardi 18/07/2018. Les investigations cliniques et paracliniques
indiquent une dyspnée cardiaque due à une hypertrophie ventriculaire. A en
croire les médecins, son état est stable et sa vie est hors de danger ; mais le
président de la Coalition des Indignés de Côte d’Ivoire (CICI) se plaint de
vertiges et de douleurs abdominales persistantes qui nécessitent une consultation
en médecine interne. Des explorations sont en cours afin de diagnostiquer le mal
qui le ronge. L’on peut raisonnablement se douter que les pathologies qu’il
développe ont été favorisées et exacerbées par les conditions de sa détention.
Par ailleurs, il faut souligner que M. SAMBA David, pensionnaire de la prison de
Korhogo sous le mandat de dépôt 16/12/2015, en lutte contre la mort, a été
transféré d’urgence à l’Institut de cardiologie d’Abidjan dans des conditions
déshumanisantes : il est resté enchaîné pendant le voyage et a subi tous ses
soins dans les mêmes conditions comme un criminel dangereux.
A la lumière de ces cas, il est indéniable que les prisons ivoiriennes sont des
espaces de faible droit. Le droit à la santé, même s’il est reconnu aux prisonniers
en général et aux détenus impliqués dans des affaires politiques en particulier,
n’est pas pleinement respecté ; les ordres d’évacuation des médecins sont parfois
tardivement pris en compte, s’ils ne le sont quand le prisonnier entre en agonie.
Tout porte à croire que la prison est devenue, entre les mains de ce régime
liberticide, une arme contre l’adversaire politique.

Consultez le rapport complet (PDF)

POUR LE FPI
LE SECRETARIAT NATIONAL
CHARGE DE L’ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
ET DES PRISONNIERS POLITIQUES

GBAGBO Michel K
Secrétaire National
Administration Pénitentiaire et Prisonniers Politiques
FPI (Front Populaire Ivoirien)
00 225 56023332
michelgbagbo@hotmail.com

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